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4La deuxième fut factice : Lacroix remettait en vente les invendus de la première édition. La trois ; 5 David Charles, « La Fortune des Rougon, roman de la Commune », Romantisme, n o 131, 1 er trimestre 2 ; 6 Voir La Fortune des Rougon, dans Les Rougon-Macquart. Histoire naturelle et sociale d’une famille ; 7 David Charles, art. cité, p. 112.; 3 Icis'explique pour la 1er fois le titre du roman : "La Fortune des Rougon". PLAN : PR prend le pouvoir dans la famille Chaque personnage agit en fonction d'une valeur qui lui est propre Observation et analyse des personnages par un romancier naturaliste Une prise de pouvoir réfléchie Il y a tout d'abord la présence du champ lexical du pouvoir dans le : Analyselittéraire de référence et résumé complet, Fiche de lecture La Fortune des Rougon de Émile Zola (Analyse littéraire de référence et résumé complet), Émile Zola, Du Cenacle Editions. Des milliers de livres avec la livraison chez vous en 1 jour ou en magasin avec -5% de réduction . Quest-ce que le projet des Rougon-macquart ? Les Rougon-Macquart, ou Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le second Empire comptent vingt romans qui s'échelonnent de La Fortune des Rougon (1871) au Docteur Pascal (1893). Le projet remonte à 1868, alors qu 'Émile Zola () est plongé dans l'œuvre de Taine et La Comédie Voustraiterez au choix, l'un des deux sujets suivants: 1- Commentaire (20 points) Objet d'étude: Le roman et le récit du Moyen Âge au XXIe siècle Vous commenterez le texte suivant: Emile Zola, La Fortune des Rougon, chapitre I, 1871 Le coup d'Etat du 2 décembre 1851, organisé par Louis-Napoléon Bonaparte, a suscité en Provence des Meilleur Site De Rencontre Gratuit Iphone. Résumé du document Tout au long de l'extrait, l'attention du lecteur est attirée sur la jeunesse des deux protagonistes, notamment par la répétition du terme "enfant" lignes 2, 9 et 23 confortée par les paroles de tante Dide "Elle est bien jeune" ligne 21. L'amour, sentiment omniprésent lignes 3 et 6, est naïf, pur et chaste. On remarque que Zola se réfère implicitement au roman grec de Longus IIème ou IIIème siècle de notre ère, Daphnis et Chloé ou Pastorales de Longus. Imprégné d'un thème littéraire datant de l'Antiquité, il raconte l'amour d'un jeune couple dans une forme d'harmonie originelle avec la nature. De fait, Silvère et Miette vivent dans la campagne provençale et nombreuses sont les références à la nature "le chaume" ligne 18, "le champ" ligne 19, "comme une chèvre échappée" lignes 19-20. De toute façon, peu avant ce passage, l'auteur soulignait "Les jeunes gens, jusqu'à cette nuit de trouble, avaient vécu une de ces naïves idylles qui naissent au milieu de la classe ouvrière, parmi ces déshérités, ces simples d'esprit, chez lesquels on retrouve encore parfois les amours primitives des anciens contes grecs." Cet amour, attaché à ce lieu particulier que rend le souvenir, est d'autant plus puérile qu'attaché négativement au temps. D'abord avec le passé de tante Dide "Une seconde fois, la porte était complice. Par où l'amour avait passé, l'amour passait de nouveau" lignes 5-6, "C'était l'éternel recommencement" ligne 7. Mais aussi, lorsque plus loin dans le chapitre, le couple rejoindra la colonne insurrectionnelle, il mourra. b- Un bonheur fragile Si le bonheur de Silvère et Miette est innocent, auréolé de pureté et de clarté "dans la claire matinée", ligne 5 ; "dans le soleil limpide", ligne 24 ; "la trouée blanche", ligne 31, son caractère éphémère est souligné par la présence permanente de la mort, avec le chiasme "ses joies présentes et ses larmes futures" ligne 7, "à se griser d'un bonheur qui irrite la mort" ligne 12, l'oxymore "ces douceurs mortelles" ligne 16 et "Prends garde, mon garçon, on en meurt" ligne 25 ... Sommaire IntroductionI Une idylle puérileA. La jeunesse des amoureuxB. Un bonheur fragileII La portée symbolique de la porteA. Une personnificationB. Une valeur symboliqueIII Un passage prémonitoire de la folie de tante DideA. Un personnage fragileB. Une hallucination prémonitoireConclusion Extraits [...] Tante Dide ne vit que les larmes, et elle eut comme un pressentiment rapide qui lui montra les deux enfants saignants, frappés au cœur. Toute secouée par le souvenir des souffrances 10 de sa vie, que ce lieu venait de réveiller en elle, elle pleura son cher Silvère. Elle seule était coupable ; si elle n'avait pas jadis troué la muraille, Silvère ne serait point dans ce coin perdu, aux pieds d'une fille, à se griser d'un bonheur qui irrite la mort et la rend jalouse. [...] [...] Elle est bien jeune, murmura-t-elle. Elle a le temps. Sans doute, elle voulait dire que Miette avait le temps de souffrir et de pleurer. Puis, reportant ses yeux sur Silvère, qui avait suivi avec extase la course de l'enfant dans le soleil limpide, elle ajouta simplement 25 Prends garde, mon garçon, on en meurt. Ce furent les seules paroles qu'elle prononça en cette aventure, qui remua toutes les douleurs endormies au fond de son être. Elle s'était fait une religion du silence. [...] [...] - forte de cette hallucination, elle prédit l'avenir un pressentiment rapide qui lui montra les deux enfants saignants, frappés au cœur lignes à se griser d'un bonheur qui irrite la mort et la rend jalouse ligne Elle a le temps ligne Prends garde, mon garçon, on en meurt ligne 25. Psychologiquement fragile, tante Dide a une vision irrationnelle des événements, qui paradoxalement va se révéler juste. Conclusion Alors que l'affrontement des insurgés avec les forces de l'ordre ne saurait tarder, Silvère se remémore son idylle avec Miette, et en particulier le bonheur du rapprochement physique des deux jeunes gens. Mais, en ouvrant la porte de la muraille trouée, il a transgressé un interdit. [...] [...] À l'époque, cette trouée dans la muraille avait scandalisée tout Plassans. Cet extrait va présenter l'aspect enfantin de l'amour entre Miette et Silvère et, à travers la valeur symbolique du mur, révéler une fois encore la folie de tante Dide. Une idylle puérile La jeunesse des amoureux Tout au long de l'extrait, l'attention du lecteur est attirée sur la jeunesse des deux protagonistes, notamment par la répétition du terme enfant lignes et 23 confortée par les paroles de tante Dide Elle est bien jeune ligne 21. [...] [...] II- La portée symbolique de la porte Parmi l'épisode des souvenirs de Silvère, la porte joue un rôle important elle va permettre le rapprochement physique du couple. Une personnification Ouvrant la porte maudite, ligne et concluant ce passage la trouée blanche, ligne un champ lexical omniprésent révèle sa personnification lorsqu'elle est ouverte la porte était complice ligne si elle n'avait pas jadis troué la muraille ligne elle ferma la porte à double tour ligne la porte ne la rendrait plus complice ligne 29. [...] Résumé Détails Compatibilité Autres formats L'action se déroule à Paris. Eugène Rougon a fait carrière en politique grâce à son soutien à Napoléon III il est ministre. Son frère Aristide commence en bas de l'échelle par un modeste emploi. Sa femme s'appelle Angèle. Ils ont une fille Clotilde, placée chez son frère, le docteur Pascal Rougon à Plassans, et un fils, Maxime, mis en pension. Ils habitent un modeste appartement de deux pièces. Eugène aide son frère à obtenir un emploi à la mairie de Paris, ce qui permet à ce dernier d'avoir accès à tous les plans des travaux d'Haussmann. Lire plusexpand_more Titre La Curée EAN 9782322449576 Éditeur Books on Demand Date de parution 22/08/2022 Format ePub Poids du fichier kb Protection Filigrane numérique L'ebook La Curée est au format ePub protégé par Filigrane numérique check_circle Cet ebook est compatible pour une lecture sur application iOs et Android Vivlio. check_circle Cet ebook est compatible pour une lecture sur My Vivlio. check_circle Cet ebook est compatible pour une lecture sur le lecteur Vivlio. check_circle Cet ebook est compatible pour une lecture sur liseuse. Je crée ma liste d’envies Vous devez être connectée pour pouvoir créer et sauvegarder votre liste d’envies cancel Déjà cliente ?Se connecter Pas encore inscrite ?Mon compte Un compte vous permettra en un clin d’oeil de commander sur notre boutique consulter et suivre vos commandes gérer vos informations personnelles accéder à tous les e-books que vous avez achetés avoir des suggestions de lectures personnalisées Livre non trouvé Oups ! 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Quel personnage de Germinal est issu de la famille des Rougon-macquart ? Pourquoi lire les Rougon-macquart ? Quel livre de Zola lire en premier ? Quel est le grand projet romanesque de Zola ? Qui mène la grève dans Germinal de Zola ? Quel cadre Spatio-temporel Zola Choisit-il pour son œuvre ? Quel cycle romanesque Zola A-t-il ecrit ? Quel est le but d Emile Zola ? Quelles sont les Rougon-macquart ? Le titre générique Les Rougon-Macquart regroupe un ensemble de 20 romans écrits par Émile Zola entre 18. Qu'est-ce que le projet des Rougon-macquart ? Les Rougon-Macquart, ou Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le second Empire comptent vingt romans qui s'échelonnent de La Fortune des Rougon 1871 au Docteur Pascal 1893. Le projet remonte à 1868, alors qu'Émile Zola est plongé dans l'œuvre de Taine et La Comédie humaine de Balzac. Quel personnage de Germinal est issu de la famille des Rougon-macquart ? Étienne Lantier est un personnage de fiction créé par l'écrivain Émile Zola. C'est l'un des protagonistes du roman Germinal dans la série des Rougon-Macquart, qui se bat pour l'amélioration des conditions de vie des mineurs de charbon dans le Nord de la France. Pourquoi lire les Rougon-macquart ? Il porte comme sous-titre Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire, rappelant ainsi les ambitions de Zola Les Rougon-Macquart personnifieront l'époque, l'Empire lui-même. » Inspiré de La Comédie humaine de Balzac, l'ouvrage a notamment pour but d'étudier l'influence du milieu sur l'Homme et ... Quel livre de Zola lire en premier ? Si vous n'avez qu'un roman d'Émile Zola à lire, je vous suggère sans hésitation L'Assommoir, qui est selon moi un grand chef-d'œuvre. Quel est le grand projet romanesque de Zola ? En 1868, Zola s'engage dans un grand projet raconter "l'histoire naturelle et sociale d'une famille sous le second Empire", et son "épanouissement dans le monde moderne, dans toutes les classes". Qui mène la grève dans Germinal de Zola ? Il rencontre aussi un des dirigeants de la grève Émile Basly, âgé d'une trentaine d'années, ancien mineur devenu cabaretier en face du coron Jean-Bart, avec pour enseigne Au xix e siècle, et qui vient d'être élu secrétaire général de la chambre syndicale des mineurs du Nord un homme qui a traversé les deux ... Quel cadre Spatio-temporel Zola Choisit-il pour son œuvre ? Dans ce chapitre 1, Zola établit de manière très claire le cadre spatio-temporel de son roman. Le récit se déroule à Paris. En témoigne la toponymie riche qui jalonne le récit gare Saint-Lazare » place Gaillon » ; à l'encoignure de la rue de la Michodière et de la rue Neuve-Saint-Augustin ». Quel cycle romanesque Zola A-t-il ecrit ? Les Rougon-Macquart Les Rougon-Macquart, ou Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le second Empire compte 20 romans qui s'échelonnent de La Fortune des Rougon 1871 au Docteur Pascal 1893. Quel est le but d Emile Zola ? Le but du romancier est donc d'être objectif autant que possible, de rester neutre dans la représentation de la société et des individus qui la composent, afin de les montrer tels qu'ils sont. • Thérèse Raquin 1867 Thérèse et son amant Laurent jettent à la Seine, lors d’une partie de campagne, Camille Raquin, mari de Thérèse. Mais le souvenir de Camille, matérialisé par divers signes symboliques une cicatrice, un portrait, le chat noir, s’interpose entre les deux amants et les rend impuissants à continuer leur union charnelle c’est la forme naturaliste » du remords. Dans une crise de haine mutuelle, ils révèlent leur crime à la mère de Camille, devenue paralytique et muette. Et ils finissent par se suicider ensemble sous ses yeux. • La Fortune des Rougon 1871 Pierre et Félicité Rougon sont des commerçants de Plassans, en Provence ville imaginée sur le modèle d’Aix-en-Provence. A la faveur du coup d’Etat de Louis Napoléon Bonaparte 2 décembre 1851, ils conquièrent le pouvoir politique dans la ville, et la fortune. Les paysans et les bûcherons républicains des environs ont tenté de résister par les armes au coup d’Etat, mais ils sont durement réprimés après une bataille perdue contre l’armée. Silvère Mouret, jeune parent des Rougon, meurt, avec la jeune fille qu’il aime, Miette, pour la défense de la République, laissant place nette aux appétits et aux ambitions du clan Rougon. Antoine Macquart, demi-frère de Pierre Rougon, dupé par celui-ci, trahit les républicains. Le roman s’achève sur la victoire politique et sociale des bonapartistes de Plassans, qui annonce les succès futurs de la descendance Rougon dans la société impériale. C’est le début de l’ Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire.» • La curée 1872 Aristide Rougon, fils de Pierre voir La Fortune des Rougon, vient de Plassans à Paris, au début du Second Empire. Employé à l’Hôtel de Ville, il s’informe frauduleusement des projets de grands travaux du préfet Haussmann et se lance dans la spéculation immobilière, truquant les dossiers et achetant les consciences. Enrichi, usant du pseudonyme d’Aristide Saccard, il habite avec sa seconde femme, Renée, un somptueux hôtel particulier près du parc Monceau. Renée Saccard et Maxime, son beau-fils, né du premier mariage d’Aristide, deviennent amants. C’est la double quête de l’or et du plaisir, dans la société corrompue du Second Empire. Aristide dépouille sa femme pour renflouer ses affaires momentanément en péril, et Maxime abandonne Renée pour épouser une héritière aristocrate, Louise de Mareuil, Renée meurt ruinée et bafouée par les deux hommes. • Le ventre de Paris 1873 Le roman se passe au coeur de Paris, dans le monde gras et coloré des Halles. Florent, déporté en Guyane après le coup d’Etat de décembre 1851, s’est évadé de Cayenne, et revient à Paris. Il y est recueilli par son parent, le charcutier Quenu, et la femme de ce dernier, Lisa, fille d’Antoine Macquart voir La Fortune des Rougon. Ceux-ci lui trouvent une place d’inspecteur de la marée, sur le carreau des Halles. Mais ce républicain maigre est mal à l’aise dans ce monde de la nourriture grasse, et des commerçants gras, conservateurs, attachés, comme Lisa la charcutière, au profit quotidien que leur assure l’Empire. Compromis dans un complot contre le régime impérial préparé par des illuminés et des provocateurs à la solde de la police, il est dénoncé par Lisa et réexpédié en prison. Le ventre de Paris l’a expulsé comme un déchet. Le jeune peintre Claude Lantier tire la morale de l’histoire Quels gredins que les honnêtes gens! » • La Conquête de Plassans 1874 L’action se transporte de nouveau à Plassans. Les conservateurs s’y partagent entre bonapartistes menés par Félicité et Pierre Rougon, les légitimistes et les orléanistes. En face d’eux, les républicains parmi lesquels François Mouret, dont l’épouse, Marthe, est la fille des Rougon. L’abbé Faujas, agent occulte du régime impérial, a pour mission d’amener les monarchistes légitimistes et orléanistes à soutenir le régime de Napoléon III. 11 se servira pour cela de son autorité ecclésiastique, et du pouvoir spirituel qu’il s’assure sur les femmes, notamment sur Marthe Mouret. Il a pris location chez les Mouret, d’où il veille à réunir ensemble les trois clans conservateurs, et à écarter le républicain Mouret. Il finira par faire passer celui-ci pour fou et à le faire interner, pour avoir le champ totalement libre. Mais Mouret s’évade. Devenu réellement fou, il met le feu à sa demeure, et Faujas périt dans l’incendie. • La Faute de l’abbé Mouret 1875 L’abbé Serge Mouret, un des deux fils de Marthe Rougon et François Mouret, curé d’un village de Provence, les Artauds, perd la mémoire à la suite d’une grave maladie, qui l’a laissé épuisé. Son oncle, le docteur Pascal Rougon fils de Pierre Rougon et frère d’Aristide et de Marthe Rougon le fait transporter dans une demeure isolée au milieu d’un grand parc, le Paradou. Là, il est soigné par une jeune fille, Albine. Il reprend vie, tout en demeurant amnésique. Au terme d’une série de promenades et d’explorations à travers la végétation luxuriante du parc, les deux jeunes gens deviennent amants. Mais l’église, par l’intermédiaire du terrible frère Archangias, reprend son serviteur. Serge Mouret revient à la mémoire et à son sacerdoce, et abandonne Albine, qui se laisse mourir, au milieu des roses. • Son Excellence Eugène Rougon 1876 Eugène Rougon est un des trois fils de Pierre Rougon et Félicité Puech, avec Aristide et Pascal. Installé à Paris dès avant le coup d’Etat et la conquête de Plassans » par les bonapartistes, il fait une carrière politique. Il est devenu président du Conseil d’Etat, et principal exécutant de la politique impériale. Les intrigues d’une femme, Clorinde Balbi, séductrice et aventurière, liée à un rival d’Eugène, éloignent momentanément celui-ci du pouvoir. Mais au lendemain de l’attentat d’Orsini en 1858, Eugène Rougon est rappelé au gouvernement, pour dirier une répression brutale et massive, aidé d’une bande de séïdes et d’obligés. A la fin du roman, il n’en prendra pas moins le virage de l’empire libéral, fondant son triomphe sur l’opportunisme. • L’Assommoir 1877 Zola revient à la seconde branche de la famille des Rougon-Macquart. Gervaise Macquart, fille d’Antoine Macquart voir La Fortune des Rougon, blanchisseuse, est abandonnée, dans un hôtel du quartier populaire de la Chapelle, par son amant Lantier. Elle reste seule avec ses deux petits garçons, Etienne et Claude le futur peintre, que le lecteur a déjà rencontré dans Le Ventre de Paris. Un ouvrier zingueur, Coupeau, devient amoureux d’elle et l’épouse. Ils ont une fille, Anna, dite Nana. Gervaise ouvre une boutique de blanchisserie, rue de la Goutte-d’or, et conquiert, à force de travail, un peu d’aisance. Mais Coupeau tombe d’un toit et se met à boire, au cabaret de l’Assommoir. Le couple, après une dernière fête partagée avec les proches voisins pour l’anniversaire de Gervaise, retourne à la misère. Lantier a réapparu et a fait de nouveau de Gervaise sa maîtresse, avant de la réduire à l’état de domestique misérable et humiliée. Nana se débauche. Coupeau, emporté par l’alcoolisme, meurt à l’hôpital. Gervaise, épuisée, affamée, le suivra de peu dans la mort. Une page d’amour 1878 Hélène Mouret, fille d’Ursule Macquart soeur d’Antoine et du chapelier Mouret, est la soeur de François Mouret La Conquête de Plassans et de Silvère Mouret La Fortune des Rougon. Veuve de Grandjean, elle demeure à Passy, avec sa fille Jeanne, de santé très fragile. Un vieil ami de famille et son frère, un prêtre, lui rendent régulièrement visite. Un médecin du quartier, le docteur Deberle, soigne Jeanne, qu’il a sauvée d’une crise très grave. Séduisant et séducteur, il s’éprend d’Hélène, que par ailleurs son épouse reçoit. Il n’a de cesse d’obtenir un rendez- vous de la jeune femme. Mais tandis qu’elle devient la maîtresse de Deberle, pour une unique rencontre, Jeanne, restée seule, en proie à la jalousie, se laisse tremper par un orage. Elle en mourra, déchirant la page d’amour» de sa mère qui, désemparée et désespérée, se laissera convaincre par le prêtre d’épouser le vieil ami de la famille, et partira avec ce dernier pour Marseille. •Nana 1880 Nana est la fille de Gervaise Macquart et de Coupeau L’Assommoir. Initiée très tôt à la débauche, elle suscite le désir des hommes par sa beauté plantureuse et facile. Elle s’exhibe sur les scènes d’opérettes bouffonnes et mène parallèlement une carrière de cocotte ». Entretenue par le comte Muffat, elle le trompe avec des camarades de coulisses. Elle conduit au désespoir et à la déchéance tous les hommes qui la désirent, et qu’elle bafoue les uns après les autres l’un tente de se tuer dans l’appartement où elle le reçoit, l’autre disparaît dans l’incendie volontaire de son écurie de courses. Le comte Muffat accepte pour elle toutes les humiliations. Mais elle a trop préjugé de son attrait. Son étoile scénique et amoureuse pâlit. Elle finira misérablement, mourant de la petite vérole le jour de la déclaration de guerre à la Prusse. • Pot-Bouille 1882 Octave Mouret, fils aîné de François et Marthe Mouret La Conquête de Plassans est venu faire fortune à Paris. Il s’est logé dans un immeuble de la rue de Choiseul, au cœur du Paris commerçant. Il fait connaissance avec les familles qui habitent les différents étages de l’immeuble, en bourgeois cossus ou appauvris. Il surprend les secrets de leurs affaires et de leur intimité, et il séduit les femmes et les filles. C’est la marmite — la pot-bouille », selon un terme populaire d’époque — des mariages arrangés, des captations d’héritage, des adultères et des amours ancillaires. Du haut en bas de l’immeuble, les bonnes commentent l’envers de la respectabilité de leurs maîtres. Octave Mouret épouse Mme Hédouin, une veuve propriétaire d’un magasin de nouveautés. C’est le début de son ascension vers le succès et la richesse. •Au bonheur des dames1883 Octave Mouret Pot-Bouille est devenu veuf de Caroline Hédouin. Le voilà à la tête du magasin de nouveautés dont elle était propriétaire, Au Bonheur des Dames ». Une jeune fille arrivée de province, Denise Baudu, y est engagée comme vendeuse, et connaît la dure condition du calicot », au bas de la hiérarchie du magasin, tandis que Octave Mouret transforme celui-ci en temple moderne et colossal du grand commerce, en spéculant sur la passion des femmes pour les étoffes et les modes. Or, il remarque Denise et s’éprend d’elle. Mais celle-ci, à la différence des autres femmes, lui résiste. Toute sa fortune ne peut rien contre la vertu de la jeune fille, qui se fait aimer de lui sans lui céder. Elle obtient de lui qu’il améliore les conditions de travail de son personnel et finalement accepte de l’épouser, comme dans les contes anciens les bergères épousaient les fils des rois. •La Joie de vivre 1884 Pauline Quenu, fille de Lisa Macquart, la charcutière du Ventre de Paris, est devenue orpheline à dix ans. Elle est recueillie par les Chanteau, qui sont retirés dans un petit village de pêcheurs de Normandie, au bord de la mer. Charitable pour tous, elle secourt toutes les misères et les douleurs des pauvres gens qui l’entourent. Le fils Chanteau, Lazare, est un garçon de faible caractère, qui fait se succéder les projets inaboutis. Pauline, qui l’aime, alors que lui ne la considère que comme une jeune et bonne camarade, et va en épouser une autre, sacrifie la fortune dont elle est héritière pour l’aider dans ses entreprises illusoires. Mme Chanteau meurt d’une maladie de cœur tandis que son mari souffre atrocement de la goutte. La femme de Lazare meurt en couches. La servante se pend... A toutes ces misères et ces absurdités de l’existence, Pauline, bonne et sereine, oppose, en dépit de tout, sa confiance dans la vie. • Germinal1885 Étienne Lantier, fils de Gervaise Macquart et de son amant Lantier L Assommoir, quitte un atelier des chemins de fer, à Lille, et devient ouvrier mineur aux mines de Montsou, un site imaginaire du nord de la France. Sous la conduite du chef d’équipe, Maheu, il apprend son nouveau métier. Avec les Maheu, il connaît la misère et la révolte. Mais il s’initie à la lutte sociale et politique. Il aime Catherine, la fille de Maheu et de la Maheude, mais Catherine appartient à Chaval. Lantier devient le leader d’une grève qui, sous l’effet dc l’exaspération, dégénère en manifestations violentes et que l’armée réprime dans le sang. Chaval a trahi ses compagnons. Maheu meurt sous les balles. Le nihiliste Souvarine sabote le puits de mine. Etienne Lantier, isolé au fond, avec Chaval et Catherine, tue Chaval. Catherine meurt d’épuisement après s’être donnée à lui. Etienne, seul survivant de la catastrophe, quitte l’univers de la mine pour Paris. •L’Œuvre 1886 Claude Lantier, fils de Gervaise Macquait et d’Auguste Lantier L’Assommoir, est un peintre exigeant, jamais satisfait de son art. Il appartient à une génération de jeunes peintres qui veulent ouvrir leurs toiles à la nature et aux sujets modernes et les baigner de lumière et de couleurs. Il recueille une jeune fille, Christine, qui devient son modèle et sa maîtresse. De son tableau intitulé Plein air, qui fait scandale au Salon, va naître une nouvelle école. Mais, malgré l’amour de Christine, la complicité de ses camarades — parmi lesquels l’écrivain Sandoz —, les villégiatures à Bennecourt sur les bords de la Seine, les stations sur les ponts devant le paysage parisien, il se laisse pénétrer par le doute. Le portrait de son enfant mort suscite l’indifférence. Il se pend devant le tableau visionnaire d’une femme nue, qu’ il n’a pas réussi à porter au point de perfection dont il rêvait. •La Terre 1887 Jean Macquart, fils d’Antoine Macquart La Fortune des Rougon et frère de Gervaise L’Assommoir, est valet de ferme en Beauce. Il épouse Françoise Mouche, dont la sœur Lise est la femme de Butcau. Le père de celui-ci, le vieux Fouan, a donné ses terres à ses enfants, en échange d’une pension. Mais sous prétexte que l’autre fils du vieux paysan, surnommé Jésus-Christ, boit sa part d’héritage, Buteau ne veut rien verser à son père. Il lorgne d’autre part l’héritage de sa femme Lise et de sa belle-sœur Françoise. La grossesse de celle-ci, qui lui ferait perdre une part dés biens des deux sœurs, l’enrage. Il viole et blesse mortellement Françoise, avec la complicité dc Lise, et accapare aussi le bien de Mouche. Fouan, dépouillé par ses fils, a été le témoin du meurtre il est assassiné à son tour par les Buteau. * Le Rêve 1888 Angélique, fille non reconnue de Sidonie Rougon la soeur d’Eugène et d’Aristide Rougon, voir La Fortune des Rougon, La Curée, a été recueillie par les Hobert, un couple de brodeurs qui vit à l’ombre de la cathédrale de Beaumont, une ville imaginaire au nord de Paris. Elle grandit là, passionnée par La Légende dorée, qui raconte le martyre et l’élévation des saints et des saintes. L’archevêque, Mgr de Hautecoeur, a eu autrefois un fils, Félicien, avant d’entrer dans les ordres à la suite de son veuvage. Le jeune homme restaure un vitrail représentant saint Georges, sous les yeux émerveillés d’Angélique, qui confond la légende et la vie, le rêve» et le réel. Les deux jeunes gens s’aiment. Après une maladie qui a failli emporter Angélique, Mgr de Hautecoeur consent à l’union de Félicien et de la jeune fille. Mais Angélique meurt au moment même dc ses noces, sur le seuil dc l’église. La Bête humaine 1890 Jacques Lantier, fils de Gervaise Macquart, frère d’Etienne et de Claude, et demi-frère de Nana, est mécanicien de chemin dc fer sur la ligne Paris-Le Havre. Un jour de repos, sur le bord de la voie, il est témoin de l’assassinat du président Grandmorin dans un wagon, tué par le sous-chef de la gare du Havre, Roubaud, dont la femme Séverine a été séduite très jeune par Grandmorin. Jacques devient l’amant de Séverine. Mais il porte en lui, par une hérédité mauvaise, l’instinct de meurtre, Il tue Séverine dans un moment de folie. L’enquête erronée du juge Denizet conclut pour les deux meurtres à la culpabilité d’un pauvre diable, Cabuche, innocent qui paie pour les coupables. Cependant, Jacques, qui a noué une liaison avec la maîtresse de son chauffeur, Pecqueux, est pris à partie par celui-ci sur la machine la Lison en pleine vitesse. Les deux hommes roulent sous les roues, tandis que le train fou emporte une cargaison de soldats vers la guerre. L’Argent 1891 Aristide Saccard La Curée réapparaît ici. Après avoir vendu son hôtel particulier du parc Monceau, il s’est tourné vers la spéculation boursière. Il crée la Banque Universelle, qui draine les fonds des petits bourgeois catholiques et colonialistes rêvant de rechristianiser le Proche-Orient. Les cours s’envolent. Mais le succès de Saccard irrite son rival, le banquier Gundermann, Après une période d’expansion et de prospérité artificielles, entretenue par le génie spéculatif et publicitaire de Saccard, le cours des titres, qui a subi une hausse factice, s’effondre, dans une débâcle amplifiée par les manœuvres financières de Gundermann. Aristide Saccard, qui a ruiné ses actionnaires et ses propres espoirs de fortune, s’exile. •La Débâcle 1892 C’est le roman de la guerre de 1870 contre la Prusse, de la défaite de Sedan et de la Commune mars-mai 1871. Le roman se compose de trois parties qui racontent successivement la marche épuisante de l’armée conduite par le maréchal de Mac-Mahon, de Reims à Sedan, en août 1870, la bataille désastreuse de Sedan 2 septembre 1870, et les semaines du siège de Paris et de la Commune, s’achevant sur la reprise de Paris par l’armée de Versailles, dans une guerre civile atroce. Jean Macquart La Terre et Maurice Levasseur sont les deux principaux personnages. Maurice sauve la vie de Jean sur le champ de bataille de Sedan, puis la défaite les sépare. Tandis que Maurice s’engage dans les rangs des communards, Jean reste parmi les Versaillais. Pendant la Semaine sanglante », Maurice meurt sur les barricades, tué par un adversaire qui ne l’a pas reconnu, Jean. Le Docteur Pascal 1893 Pascal Rougon, médecin frère d’Eugène et d’Aristide La Curée, Son Excellence Eugène Rougon, L’Argent, qui a soigné son neveu Serge Mouret La Faute de l’abbé Mouret, vit dans la propriété de la Souleiade, à Plassans, entre sa nièce Clotilde fille d’Aristide Rougon et sa servante Martine. Il étudie l’hérédité, en prenant pour champ d’analyse sa propre famille il a consacré un dossier à chacun de ses membres, suscitant ainsi l’irritation et l’inquiétude de sa mère, Félicité Rougon, qui réussit à brûler tous ces papiers. Clotilde voue à son oncle Pascal une admiration et une affection sans limites, tout en discutant ses positions agnostiques. Pascal se laisse gagner par un amour où les sens trouvent leurs droits. Mais il meurt le jour même où Clotilde lui annonce la naissance prochaine de leur enfant celui- ci, peut-être, régénérera la famille des Rougon-Macquart. SommaireChapitre IChapitre IIChapitre IIIChapitre IVChapitre VChapitre VIChapitre VIIChapitre VIIIChapitre IXChapitre XChapitre XIChapitre XIIChapitre XIIIChapitre XIVIPendant le rude hiver de 1860, l’Oise gela, de grandes neiges couvrirent les plaines de la basse Picardie ; et il en vint surtout une bourrasque du nord-est, qui ensevelit presque Beaumont, le jour de la Noël. La neige, s’étant mise à tomber dès le matin, redoubla vers le soir, s’amassa durant toute la nuit. Dans la ville haute, rue des Orfèvres, au bout de laquelle se trouve comme enclavée la façade nord du transept de la cathédrale, elle s’engouffrait, poussée par le vent, et allait battre la porte Sainte-Agnès, l’antique porte romane, presque déjà gothique, très ornée de sculptures sous la nudité du pignon. Le lendemain, à l’aube, il y en eut là près de trois rue dormait encore, emparessée par la fête de la veille. Six heures sonnèrent. Dans les ténèbres, que bleuissait la chute lente et entêtée des flocons, seule une forme indécise vivait, une fillette de neuf ans, qui, réfugiée sous les voussures de la porte, y avait passé la nuit à grelotter, en s’abritant de son mieux. Elle était vêtue de loques, la tête enveloppée d’un lambeau de foulard, les pieds nus dans de gros souliers d’homme. Sans doute elle n’avait échoué là qu’après avoir longtemps battu la ville, car elle y était tombée de lassitude. Pour elle, c’était le bout de la terre, plus personne ni plus rien, l’abandon dernier, la faim qui ronge, le froid qui tue ; et, dans sa faiblesse, étouffée par le poids lourd de son coeur, elle cessait de lutter, il ne lui restait que le recul physique, l’instinct de changer de place, de s’enfoncer dans ces vieilles pierres, lorsqu’une rafale faisait tourbillonner la heures, les heures coulaient. Longtemps, entre le double vantail des deux baies jumelles, elle s’était adossée au trumeau, dont le pilier porte une statue de sainte Agnès, la martyre de treize ans, une petite fille comme elle, avec la palme et un agneau à ses pieds. Et, dans le tympan, au-dessus du linteau, toute la légende de la vierge enfant, fiancée à Jésus, se déroule, en haut relief, d’une foi naïve ses cheveux qui s’allongèrent et la vêtirent, lorsque le gouverneur, dont elle refusait le fils, l’envoya nue aux mauvais lieux ; les flammes du bûcher qui, s’écartant de ses membres, brûlèrent les bourreaux, dès qu’ils eurent allumé le bois ; les miracles de ses ossements, Constance, fille de l’empereur, guérie de la lèpre, et les miracles d’une de ses figures peintes, le prêtre Paulin, tourmenté du besoin de prendre femme, présentant, sur le conseil du pape, l’anneau orné d’une émeraude à l’image, qui tendit le doigt, puis le rentra, gardant l’anneau qu’on y voit encore, ce qui délivra Paulin. Au sommet du tympan, dans une gloire, Agnès est enfin reçue au ciel, où son fiancé Jésus l’épouse, toute petite et si jeune, en lui donnant le baiser des éternelles lorsque le vent enfilait la rue, la neige fouettait de face, des paquets blancs menaçaient de barrer le seuil ; et l’enfant, alors, se garait sur les côtés, contre les vierges posées au-dessus du stylobate de l’ébrasement. Ce sont les compagnes d’Agnès, les saintes qui lui servent d’escorte trois à sa droite, Dorothée, nourrie en prison de pain miraculeux, Barbe, qui vécut dans une tour, Geneviève, dont la virginité sauva Paris ; et trois à sa gauche, Agathe, les mamelles tordues et arrachées, Christine, torturée par son père, et qui lui jeta de sa chair au visage, Cécile, qui fut aimée d’un ange. Au-dessus d’elles, des vierges encore, trois rangs serrés de vierges montent avec les arcs des claveaux, garnissent les trois voussures d’une floraison de chairs triomphantes et chastes, en bas martyrisées, broyées dans les tourments, en haut accueillies par un vol de chérubins, ravies d’extase au milieu de la cour rien ne la protégeait plus, depuis longtemps, lorsque huit heures sonnèrent et que le jour grandit. La neige, si elle ne l’eût foulée, lui serait allée aux épaules. L’antique porte, derrière elle, s’en trouvait tapissée, comme tendue d’hermine, toute blanche ainsi qu’un reposoir, au bas de la façade grise, si nue et si lisse, que pas un flocon ne s’y accrochait. Les grandes saintes de l’ébrasement surtout en étaient vêtues, de leurs pieds blancs à leurs cheveux blancs, éclatantes de candeur. Plus haut, les scènes du tympan, les petites saintes des voussures s’enlevaient en arêtes vives, dessinées d’un trait de clarté sur le fond sombre ; et cela jusqu’au ravissement final, au mariage d’Agnès, que les archanges semblaient célébrer sous une pluie de roses blanches. Debout sur son pilier, avec sa palme blanche, son agneau blanc, la statue de la vierge enfant avait la pureté blanche, le corps de neige immaculé, dans cette raideur immobile du froid, qui glaçait autour d’elle le mystique élancement de la virginité victorieuse. Et, à ses pieds, l’autre, l’enfant misérable, blanche de neige, elle aussi, raidie et blanche à croire qu’elle devenait de pierre, ne se distinguait plus des grandes le long des façades endormies, une persienne qui se rabattit en claquant lui fit lever les yeux. C’était, à sa droite, au premier étage de la maison qui touchait à la cathédrale. Une femme, très belle, une brune forte, d’environ quarante ans, venait de se pencher là ; et, malgré la gelée terrible, elle laissa une minute son bras nu dehors, ayant vu remuer l’enfant. Une surprise apitoyée attrista son calme visage. Puis, dans un frisson, elle referma la fenêtre. Elle emportait la vision rapide, sous le lambeau de foulard, d’une gamine blonde, avec des yeux couleur de violette ; la face allongée, le col surtout très long, d’une élégance de lis, sur des épaules tombantes ; mais bleuie de froid, ses petites mains et ses petits pieds à moitié morts, n’ayant plus de vivant que la buée légère de son machinale, était restée les yeux en l’air, regardant la maison, une étroite maison à un seul étage, très ancienne, bâtie vers la fin du quinzième siècle. Elle se trouvait scellée au flanc même de la cathédrale, entre deux contreforts, comme une verrue qui aurait poussé entre les deux doigts de pied d’un colosse. Et, accotée ainsi, elle s’était admirablement conservée, avec son soubassement de pierre, son étage en pans de bois, garnis de briques apparentes, son comble dont la charpente avançait d’un mètre sur le pignon, sa tourelle d’escalier saillante, à l’angle de gauche, et où la mince fenêtre gardait encore la mise en plomb du temps. L’âge toutefois avait nécessité des réparations. La couverture de tuiles devait dater de Louis XIV. On reconnaissait aisément les travaux faits vers cette époque une lucarne percée dans l’acrotère de la tourelle, des châssis à petits bois remplaçant partout ceux des vitraux primitifs, les trois baies accolées du premier étage réduites à deux, celle du milieu bouchée avec des briques, ce qui donnait à la façade la symétrie des autres constructions de la rue, plus récentes. Au rez-de-chaussée, les modifications étaient tout aussi visibles, une porte de chêne moulurée à la place de la vieille porte à ferrures, sous l’escalier, et la grande arcature centrale dont on avait maçonné le bas, les côtés et la pointe, de façon à n’avoir plus qu’une ouverture rectangulaire, une sorte de large fenêtre, au lieu de la baie en ogive qui jadis débouchait sur le pensées, l’enfant regardait toujours ce logis vénérable de maître artisan, proprement tenu, et elle lisait, clouée à gauche de la porte, une enseigne jaune, portant ces mots Hubert chasublier, en vieilles lettres noires, lorsque, de nouveau, le bruit d’un volet rabattu l’occupa. Cette fois, c’était le volet de la fenêtre carrée du rez-de-chaussée un homme à son tour se penchait, le visage tourmenté, au nez en bec d’aigle, au front bossu, couronné de cheveux épais et blancs déjà, malgré ses quarante-cinq ans à peine ; et lui aussi s’oublia une minute à l’examiner, avec un pli douloureux de sa grande bouche tendre. Ensuite, elle le vit qui demeurait debout, derrière les petites vitres verdâtres. Il se tourna, il eut un geste, sa femme reparut, très belle. Tous les deux, côte à côte, ne bougeaient plus, ne la quittaient plus du regard, l’air profondément y avait quatre cents ans que la lignée des Hubert, brodeurs de père en fils, habitait cette maison. Un maître chasublier l’avait fait construire sous Louis XI, un autre, réparer sous Louis XIV ; et l’Hubert actuel y brodait des chasubles, comme tous ceux de sa race. À vingt ans, il avait aimé une jeune fille de seize ans, Hubertine, d’une telle passion, que, sur le refus de la mère, veuve d’un magistrat, il l’avait enlevée, puis épousée. Elle était d’une beauté merveilleuse, ce fut tout leur roman, leur joie et leur malheur. Lorsque, huit mois plus tard, enceinte, elle vint au lit de mort de sa mère, celle-ci la déshérita et la maudit, si bien que l’enfant, né le même soir, mourut. Et, depuis, au cimetière, dans son cercueil, l’entêtée bourgeoise ne pardonnait toujours pas, car le ménage n’avait plus eu d’enfant, malgré son ardent désir. Après vingt-quatre années, ils pleuraient encore celui qu’ils avaient perdu, ils désespéraient maintenant de jamais fléchir la de leurs regards, la petite s’était renfoncée derrière le pilier de sainte Agnès. Elle s’inquiétait aussi du réveil de la rue les boutiques s’ouvraient, du monde commençait à sortir. Cette rue des Orfèvres, dont le bout vient buter contre la façade latérale de l’église, serait une vraie impasse, bouchée du côté de l’abside par la maison des Hubert, si la rue Soleil, un étroit couloir, ne la dégageait de l’autre côté, en filant le long du collatéral, jusqu’à la grande façade, place du Cloître ; et il passa deux dévotes, qui eurent un coup d’œil étonné sur cette petite mendiante, qu’elles ne connaissaient pas, à Beaumont. La tombée lente et obstinée de la neige continuait, le froid semblait augmenter avec le jour blafard, on n’entendait qu’un lointain bruit de voix, dans la sourde épaisseur du grand linceul blanc qui couvrait la sauvage, honteuse de son abandon comme d’une faute, l’enfant se recula encore, lorsque, tout d’un coup, elle reconnut devant elle Hubertine, qui, n’ayant pas de bonne, était sortie chercher son pain.– Petite, que fais-tu là ? qui es-tu ?Et elle ne répondit point, elle se cachait le visage. Cependant elle ne sentait plus ses membres, son être s’évanouissait, comme si son cœur, devenu de glace, se fût arrêté. Quand la bonne dame eut tourné le dos, avec un geste de pitié discrète, elle s’affaissa sur les genoux, à bout de forces, glissa ainsi qu’une chiffe dans la neige, dont les flocons, silencieusement, l’ensevelirent. Et la dame, qui revenait avec son pain tout chaud, l’apercevant ainsi par terre, de nouveau s’approcha.– Voyons, petite, tu ne peux rester sous cette Hubert, qui était sorti à son tour, debout au seuil de la maison, la débarrassa du pain, en disant – Prends-la donc, apporte-la !Hubertine, sans ajouter rien, la prit dans ses bras solides. Et l’enfant ne se reculait plus, emportée comme une chose, les dents serrées, les yeux fermés, toute froide, d’une légèreté de petit oiseau tombé de son rentra, Hubert referma la porte, tandis qu’Hubertine, chargée de son fardeau, traversait la pièce sur la rue, qui servait de salon et où quelques pans de broderie étaient en montre, devant la grande fenêtre carrée. Puis, elle passa dans la cuisine, l’ancienne salle commune, conservée presque intacte, avec ses poutres apparentes, son dallage raccommodé en vingt endroits, sa vaste cheminée au manteau de pierre. Sur les planches, les ustensiles, pots, bouilloires, bassines, dataient d’un ou deux siècles, de vieilles faïences, de vieux grès, de vieux étains. Mais, occupant l’âtre de la cheminée, il y avait un fourneau moderne, un large fourneau de fonte, dont les garnitures de cuivre luisaient. Il était rouge, on entendait bouillir l’eau du coquemar. Une casserole, pleine de café au lait, se tenait chaude, à l’un des bouts.– Fichtre ! il fait meilleur ici que dehors, dit Hubert, en posant le pain sur une lourde table Louis XIII qui occupait le milieu de la pièce. Mets cette pauvre mignonne près du fourneau, elle va se Hubertine asseyait l’enfant ; et tous les deux la regardèrent revenir à elle. La neige de ses vêtements fondait, tombait en gouttes pesantes. Par les trous des gros souliers d’homme, on voyait ses petits pieds meurtris, tandis que la mince robe dessinait la rigidité de ses membres, ce pitoyable corps de misère et de douleur. Elle eut un long frisson, ouvrit des yeux éperdus, avec le sursaut d’un animal qui se réveille pris au piège. Son visage sembla se renfoncer sous la guenille nouée à son menton. Ils la crurent infirme du bras droit, tellement elle le serrait, immobile, sur sa poitrine.– Rassure-toi, nous ne voulons pas te faire du mal… D’où viens-tu ? qui es-tu ?À mesure qu’on lui parlait, elle s’effarait davantage, tournant la tête, comme si quelqu’un était derrière elle, pour la battre. Elle examina la cuisine d’un coup d’œil furtif, les dalles, les poutres, les ustensiles brillants ; puis, son regard, par les deux fenêtres irrégulières, laissées dans l’ancienne baie, alla au-dehors, fouilla le jardin jusqu’aux arbres de l’Évêché, dont les silhouettes blanches dominaient le mur du fond, parut s’étonner de retrouver là, à gauche, le long d’une allée, la cathédrale, avec les fenêtres romanes des chapelles de son abside. Et elle eut de nouveau un grand frisson, sous la chaleur du fourneau qui commençait à la pénétrer ; et elle ramena son regard par terre, ne bougeant plus.– Est-ce que tu es de Beaumont ?… Qui est ton père ?Devant son silence, Hubert s’imagina qu’elle avait peut-être la gorge trop serrée pour répondre.– Au lieu de la questionner, dit-il, nous ferions mieux de lui servir une bonne tasse de café au lait bien si raisonnable, que, tout de suite, Hubertine donna sa propre tasse. Pendant qu’elle lui coupait deux grosses tartines, l’enfant se défiait, reculait toujours ; mais le tourment de la faim fut le plus fort, elle mangea et but goulûment. Pour ne pas la gêner, le ménage se taisait, ému de voir sa petite main trembler, au point de manquer sa bouche. Et elle ne se servait que de sa main gauche, son bras droit demeurait obstinément collé à son corps. Quand elle eut fini, elle faillit casser la tasse, qu’elle rattrapa du coude, maladroite, avec un geste d’estropiée.– Tu es donc blessée au bras ? lui demanda Hubertine. N’aie pas peur, montre un peu, ma comme elle la touchait, l’enfant, violente, se leva, se débattit ; et, dans la lutte, elle écarta le bras. Un livret cartonné, qu’elle cachait sur sa peau même, glissa par une déchirure de son corsage. Elle voulut le reprendre, resta les deux poings tordus de colère, en voyant que ces inconnus l’ouvraient et le un livret d’élève, délivré par l’Administration des Enfants assistés du département de la Seine. À la première page, audessous d’un médaillon de saint Vincent de Paul, il y avait, imprimées, les formules nom de l’élève, et un simple trait à l’encre remplissait le blanc ; puis, aux prénoms, ceux d’Angélique, Marie ; aux dates, née le 22 janvier 1851, admise le 23 du même mois, sous le numéro matricule 1634. Ainsi, père et mère inconnus, aucun papier, pas même un extrait de naissance, rien que ce livret d’une froideur administrative, avec sa couverture de toile rose pâle. Personne au monde et un écrou, l’abandon numéroté et classé.– Oh ! une enfant trouvée ! s’écria alors, parla, dans une crise folle d’emportement.– Je vaux mieux que tous les autres, oui ! je suis meilleure, meilleure, meilleure… Jamais je n’ai rien volé aux autres, et ils me volent tout… Rendez-moi ce que vous m’avez tel orgueil impuissant, une telle passion d’être la plus forte soulevaient son corps de petite femme, que les Hubert en demeurèrent saisis. Ils ne reconnaissaient plus la gamine blonde, aux yeux couleur de violette, au long col d’une grâce de lis. Les yeux étaient devenus noirs dans la face méchante, le cou sensuel s’était gonflé d’un flot de sang. Maintenant qu’elle avait chaud, elle se dressait et sifflait, ainsi qu’une couleuvre ramassée sur la neige.– Tu es donc mauvaise ? dit doucement le brodeur. C’est pour ton bien, si nous voulons savoir qui tu par-dessus l’épaule de sa femme, il parcourait le livret, que feuilletait celle-ci. À la page 2, se trouvait le nom de la nourrice. L’enfant Angélique, Marie, a été confiée le 25 janvier 1851 à la nourrice Françoise, femme du sieur Hamelin, profession de cultivateur, demeurant commune de Soulanges, arrondissement de Nevers ; laquelle nourrice a reçu, au moment du départ, le premier mois de nourriture, plus un trousseau. » Suivait un certificat de baptême, signé par l’aumônier de l’hospice des Enfants assistés ; puis, des certificats de médecins, au départ et à l’arrivée de l’enfant. Les paiements des mois, tous les trimestres, emplissaient plus loin les colonnes de quatre pages, où revenait chaque fois la signature illisible du percepteur.– Comment, Nevers ! demanda Hubertine, c’est près de Nevers que tu as été élevée ?Angélique, rouge de ne pouvoir les empêcher de lire, était retombée dans son silence farouche. Mais la colère lui desserra les lèvres, elle parla de sa nourrice.– Ah ! bien sûr que maman Nini vous aurait battus. Elle me défendait, elle, quoique tout de même elle m’allongeât des claques… Ah ! bien sûr que je n’étais pas si malheureuse, là-bas, avec les bêtes…Sa voix s’étranglait, elle continuait, en phrases coupées, incohérentes, à parler des prés où elle conduisait la Rousse, du grand chemin où l’on jouait, des galettes qu’on faisait cuire, d’un gros chien qui l’avait l’interrompit, lisant tout haut – En cas de maladie grave ou de mauvais traitements, le sous-inspecteur est autorisé à changer les enfants de nourrice. »Au-dessous, il y avait que l’enfant Angélique, Marie, avait été confiée, le 20 juin 1860, à Thérèse, femme de Louis Franchomme, tous les deux fleuristes, demeurant à Paris.– Bon ! je comprends, dit Hubertine. Tu as été malade, on t’a ramenée à ce n’était pas encore ça, les Hubert ne surent toute l’histoire que lorsqu’ils l’eurent tirée d’Angélique, morceau à morceau. Louis Franchomme, qui était le cousin de maman Nini, avait dû retourner vivre un mois dans son village, afin de se remettre d’une fièvre ; et c’était alors que sa femme Thérèse, se prenant d’une grande tendresse pour l’enfant, avait obtenu de l’emmener à Paris, où elle s’engageait à lui apprendre l’état de fleuriste. Trois mois plus tard, son mari mourait, elle se trouvait obligée, très souffrante elle-même, de se retirer chez son frère, le tanneur Rabier, établi à Beaumont. Elle y était morte dans les premiers jours de décembre, en confiant à sa belle-sœur la petite, qui, depuis ce temps, injuriée, battue, souffrait le martyre.– Les Rabier, murmura Hubert, les Rabier, oui, oui ! des tanneurs, au bord du Ligneul, dans la ville basse… Le mari boit, la femme a une mauvaise conduite.– Ils me traitaient d’enfant de la borne, poursuivit Angélique révoltée, enragée de fierté souffrante. Ils disaient que le ruisseau était assez bon pour une bâtarde. Quand elle m’avait rouée de coups, la femme me mettait de la pâtée par terre, comme à son chat ; et encore je me couchais sans manger souvent… Ah ! je me serais tuée à la fin !Elle eut un geste de furieux désespoir.– Le matin de la Noël, hier, ils ont bu, ils se sont jetés sur moi, en menaçant de me faire sauter les yeux avec le pouce, histoire de rire. Et puis, ça n’a pas marché, ils ont fini par se battre, à si grands coups de poing, que je les ai crus morts, tombés tous les deux en travers de la chambre… Depuis longtemps, j’avais résolu de me sauver. Mais je voulais mon livre. Maman Nini me le montrait des fois, en disant Tu vois, c’est tout ce que tu possèdes, car, si tu n’avais pas ça, tu n’aurais rien. » Et je savais où ils le cachaient, depuis la mort de maman Thérèse, dans le tiroir du haut de la commode… Alors, je les ai enjambés, j’ai pris le livre, j’ai couru en le serrant sous mon bras, contre ma peau. Il était trop grand, je m’imaginais que tout le monde le voyait, qu’on allait me le voler. Oh ! j’ai couru, j’ai couru ! et, quand la nuit a été noire, j’ai eu froid sous cette porte, oh ! j’ai eu froid, à croire que je n’étais plus en vie. Mais ça ne fait rien, je ne l’ai pas lâché, le voilà !Et, d’un brusque élan, comme les Hubert le refermaient pour le lui rendre, elle le leur arracha. Puis, assise, elle s’abandonna sur la table, le tenant entre ses bras et sanglotant, la joue contre la couverture de toile rose. Une humilité affreuse abattait son orgueil, tout son être semblait se fondre, dans l’amertume de ces quelques pages aux coins usés, de cette pauvre chose, qui était son trésor, l’unique lien qui la rattachât à la vie du monde. Elle ne pouvait vider son cœur d’un si grand désespoir, ses larmes coulaient, coulaient sans fin ; et, sous cet écrasement, elle avait retrouvé sa jolie figure de gamine blonde, à l’ovale un peu allongé, très pur, ses yeux de violette que la tendresse pâlissait, l’élancement délicat de son col qui la faisait ressembler à une petite vierge de vitrail. Tout d’un coup, elle saisit la main d’Hubertine, elle y colla ses lèvres avides de caresses, elle la baisa Hubert en eurent l’âme retournée, bégayant, près de pleurer eux-mêmes.– Chère, chère enfant !Elle n’était donc pas encore tout à fait mauvaise ? Peut-être pourrait-on la corriger de cette violence qui les avait effrayés.– Oh ! je vous en prie, ne me reconduisez pas chez les autres, balbutia-t-elle, ne me reconduisez pas chez les autres !Le mari et la femme s’étaient regardés. Justement, depuis l’automne, ils faisaient le projet de prendre une apprentie à demeure, quelque fillette qui égaierait la maison, si attristée de leurs regrets d’époux stériles. Et ce fut décidé tout de suite.– Veux-tu ? demanda répondit sans hâte, de sa voix calme – Je veux ils s’occupèrent des formalités. Le brodeur alla conter l’aventure au juge de paix du canton nord de Beaumont, M. Grandsire, un cousin de sa femme, le seul parent qu’elle eût revu ; et celui-ci se chargea de tout, écrivit à l’Assistance publique, où Angélique fut aisément reconnue, grâce au numéro matricule, obtint qu’elle resterait comme apprentie chez les Hubert, qui avaient un grand renom d’honnêteté. Le sous-inspecteur de l’arrondissement, en venant régulariser le livret, passa avec le nouveau patron le contrat, par lequel ce dernier devait traiter l’enfant doucement, la tenir propre, lui faire fréquenter l’école et la paroisse, avoir un lit pour la coucher seule. De son côté, l’Administration s’engageait à lui payer les indemnités et délivrer les vêtures, conformément à la dix jours, ce fut fait. Angélique couchait en haut, près du grenier, dans la chambre du comble, sur le jardin ; et elle avait déjà reçu ses premières leçons de brodeuse. Le dimanche matin, avant de la conduire à la messe, Hubertine ouvrit devant elle le vieux bahut de l’atelier, où elle serrait l’or fin. Elle tenait le livret, elle le mit au fond d’un tiroir, en disant – Regarde où je le place, pour que tu puisses le prendre, si tu en as l’envie, et que tu te matin-là, en entrant à l’église, Angélique se trouva de nouveau sous la porte Sainte-Agnès. Un faux dégel s’était produit dans la semaine, puis le froid avait recommencé, si rude, que la neige des sculptures, à demi fondue, venait de se figer en une floraison de grappes et d’aiguilles. C’était maintenant toute une glace, des robes transparentes, aux dentelles de verre, qui habillaient les vierges. Dorothée tenait un flambeau dont la coulure limpide lui tombait des mains ; Cécile portait une couronne d’argent d’où ruisselaient des perles vives ; Agathe, sur sa gorge mordue par les tenailles, était cuirassée d’une armure de cristal. Et les scènes du tympan, les petites vierges des voussures semblaient être ainsi, depuis des siècles, derrière les vitres et les gemmes d’une châsse géante. Agnès, elle, laissait traîner un manteau de cour, filé de lumière, brodé d’étoiles. Son agneau avait une toison de diamants, sa palme était devenue couleur de ciel. Toute la porte resplendissait, dans la pureté du grand se souvint de la nuit qu’elle avait passée là, sous la protection des vierges. Elle leva la tête et leur est fait de deux villes complètement séparées et distinctes Beaumont-l’Église, sur la hauteur, avec sa vieille cathédrale du douzième siècle, son évêché qui date seulement du dix-septième, ses mille âmes à peine, serrées, étouffées au fond de ses rues étroites ; et Beaumont-la-Ville, en bas du coteau, sur le bord du Ligneul, un ancien faubourg que la prospérité de ses fabriques de dentelles et de batistes a enrichi, élargi, au point qu’il compte près de dix mille habitants, des places spacieuses, une jolie sous-préfecture, de goût moderne. Les deux cantons, le canton nord et le canton sud, n’ont guère ainsi, entre eux, que des rapports administratifs. Bien qu’à une trentaine de lieues de Paris, où l’on va en deux heures, Beaumont-l’Église semble muré encore dans ses anciens remparts, dont il ne reste pourtant que trois portes. Une population stationnaire, spéciale, y vit de l’existence que les aïeux y ont menée de père en fils, depuis cinq cents cathédrale explique tout, a tout enfanté et conserve tout. Elle est la mère, la reine, énorme au milieu du petit tas des maisons basses, pareilles à une couvée abritée frileusement sous ses ailes de pierre. On n’y habite que pour elle et par elle ; les industries ne travaillent, les boutiques ne vendent que pour la nourrir, la vêtir, l’entretenir, elle et son clergé ; et, si l’on rencontre quelques bourgeois, c’est qu’ils y sont les derniers fidèles des foules disparues. Elle bat au centre, chaque rue est une de ses veines, la ville n’a d’autre souffle que le sien. De là, cette âme d’un autre âge, cet engourdissement religieux dans le passé, cette cité cloîtrée qui l’entoure, odorante d’un vieux parfum de paix et de de toute la cité mystique, la maison des Hubert, où désormais Angélique allait vivre, était la plus voisine de la cathédrale, celle qui tenait à sa chair même. L’autorisation de bâtir là, entre deux contreforts, avait dû être accordée par quelque curé de jadis, désireux de s’attacher l’ancêtre de cette lignée de brodeurs, comme maître chasublier, fournisseur de la sacristie. Du côté du midi, la masse colossale de l’église barrait l’étroit jardin d’abord le pourtour des chapelles latérales dont les fenêtres donnaient sur les plates-bandes, puis le corps élancé de la nef que les arcs-boutants épaulaient, puis le vaste comble couvert de feuilles de plomb. Jamais le soleil ne pénétrait au fond de ce jardin, les lierres et les buis seuls y poussaient vigoureusement ; et l’ombre éternelle y était pourtant très douce, tombée de la croupe géante de l’abside, une ombre religieuse, sépulcrale et pure, qui sentait bon. Dans le demi-jour verdâtre, d’une calme fraîcheur, les deux tours ne laissaient descendre que les sonneries de leurs cloches. Mais la maison entière en gardait le frisson, scellée à ces vieilles pierres, fondue en elles, vivant de leur sang. Elle tressaillait aux moindres cérémonies ; les grand-messes, le grondement des orgues, la voix des chantres, jusqu’au soupir oppressé des fidèles, bourdonnaient dans chacune de ses pièces, la berçaient d’un souffle sacré, venu de l’invisible ; et, à travers le mur attiédi, parfois même semblaient fumer des vapeurs d’ pendant cinq années, grandit là, comme dans un cloître, loin du monde. Elle ne sortait que le dimanche, pour aller entendre la messe de sept heures, Hubertine ayant obtenu de ne pas l’envoyer à l’école, où elle craignait les mauvaises fréquentations. Cette demeure antique et si resserrée, au jardin d’une paix morte, fut son univers. Elle occupait, sous le toit, une chambre passée à la chaux ; elle descendait, le matin, déjeuner à la cuisine ; elle remontait à l’atelier du premier étage, pour travailler ; et c’étaient, avec l’escalier de pierre tournant dans sa tourelle, les seuls coins où elle vécût, justement les coins vénérables, conservés d’âge en âge, car elle n’entrait jamais dans la chambre des Hubert, et ne faisait guère que traverser le salon du bas, les deux pièces rajeunies au goût de l’époque. Dans le salon, on avait plâtré les solives ; une corniche à palmettes, accompagnée d’une rosace centrale, ornait le plafond ; le papier à grandes fleurs jaunes datait du premier empire, de même que la cheminée de marbre blanc et que le meuble d’acajou, un guéridon, un canapé, quatre fauteuils, recouverts de velours d’Utrecht. Les rares fois qu’elle y venait renouveler l’étalage, quelques bandes de broderies pendues devant la fenêtre, si elle jetait un coup d’œil dehors, elle voyait la même échappée immuable, la rue butant contre la porte Sainte-Agnès une dévote poussait le vantail qui se refermait sans bruit, les boutiques de l’orfèvre et du cirier, en face, alignant leurs saints ciboires et leurs gros cierges, semblaient toujours vides. Et la paix claustrale de tout Beaumont-l’Église, de la rue Magloire, derrière l’Évêché, de la Grand-Rue où aboutit la rue des Orfèvres, de la place du Cloître où se dressent les deux tours, se sentait dans l’air assoupi, tombait lentement avec le jour pâle sur le pavé s’était chargée de compléter l’instruction d’Angélique. D’ailleurs, elle pratiquait cette opinion ancienne qu’une femme en sait assez long, quand elle met l’orthographe et qu’elle connaît les quatre règles. Mais elle eut à lutter contre le mauvais vouloir de l’enfant, qui se dissipait à regarder par les fenêtres, quoique la récréation fût médiocre, celles-ci ouvrant sur le jardin. Angélique ne se passionna guère que pour la lecture ; malgré les dictées, tirées d’un choix classique, elle n’arriva jamais à orthographier correctement une page ; et elle avait pourtant une jolie écriture, élancée et ferme, une de ces écritures irrégulières des grandes dames d’autrefois. Pour le reste, la géographie, l’histoire, le calcul, son ignorance demeura complète. À quoi bon la science ? C’était bien inutile. Plus tard, au moment de la première communion, elle apprit le mot à mot de son catéchisme, dans une telle ardeur de foi, qu’elle émerveilla le monde par la sûreté de sa première année, malgré leur douceur, les Hubert avaient désespéré souvent. Angélique, qui promettait d’être une brodeuse très adroite, les déconcertait par des sautes brusques, d’inexplicables paresses, après des journées d’application exemplaire. Elle devenait tout d’un coup molle, sournoise, volant le sucre, les yeux battus dans son visage rouge ; et, si on la grondait, elle éclatait en mauvaises réponses. Certains jours, quand ils voulaient la dompter, elle en arrivait à des crises de folie orgueilleuse, raidie, tapant des pieds et des mains, prête à déchirer et à mordre. Une peur, alors, les faisait reculer devant ce petit monstre, ils s’épouvantaient du diable qui s’agitait en elle. Qui était-elle donc ? d’où venait-elle ? Ces enfants trouvés, presque toujours, viennent du vice et du crime. À deux reprises, ils avaient résolu de s’en débarrasser, de la rendre à l’Administration, désolés, regrettant de l’avoir recueillie. Mais, chaque fois, ces affreuses scènes, dont la maison restait frémissante, se terminaient par le même déluge de larmes, la même exaltation de repentir, qui jetait l’enfant sur le carreau, dans une telle soif du châtiment, qu’il fallait bien lui à peu, Hubertine prit sur elle de l’autorité. Elle était faite pour cette éducation, avec la bonhomie de son âme, son grand air fort et doux, sa raison droite, d’un parfait équilibre. Elle lui enseignait le renoncement et l’obéissance, qu’elle opposait à la passion et à l’orgueil. Obéir, c’était vivre. Il fallait obéir à Dieu, aux parents, aux supérieurs, toute une hiérarchie de respect, en dehors de laquelle l’existence déréglée se gâtait. Aussi, à chaque révolte, pour lui apprendre l’humilité, lui imposait-elle, comme pénitence, quelque basse besogne, essuyer la vaisselle, laver la cuisine ; et elle demeurait là jusqu’au bout, la tenant courbée sur les dalles, enragée d’abord, vaincue enfin. La passion surtout l’inquiétait, chez cette enfant, l’élan et la violence de ses caresses. Plusieurs fois, elle l’avait surprise à se baiser les mains. Elle la vit s’enfiévrer pour des images, des petites gravures de sainteté, des Jésus qu’elle collectionnait ; puis, un soir, elle la trouva en pleurs, évanouie, la tête tombée sur la table, la bouche collée aux images. Ce fut encore une terrible scène, lorsqu’elle les confisqua, des cris, des larmes, comme si on lui arrachait la peau. Et, dès lors, elle la tint sévèrement, ne toléra plus ses abandons, l’accablant de travail, faisant le silence et le froid autour d’elle, dès qu’elle la sentait s’énerver, les yeux fous, les joues Hubertine s’était découvert un aide dans le livret de l’Assistance publique. Chaque trimestre, lorsque le percepteur le signait, Angélique en demeurait assombrie jusqu’au soir. Un élancement la poignait au cœur, si, par hasard, en prenant une bobine d’or dans le bahut, elle l’apercevait. Et, un jour de méchanceté furieuse, comme rien n’avait pu la vaincre et qu’elle bouleversait tout au fond du tiroir, elle était restée brusquement anéantie, devant le petit livre. Des sanglots l’étouffaient, elle s’était jetée aux pieds des Hubert, en s’humiliant, en bégayant qu’ils avaient bien eu tort de la ramasser et qu’elle ne méritait pas de manger leur pain. Depuis ce jour, l’idée du livret, souvent, la retenait dans ses fut ainsi qu’Angélique atteignit ses douze ans, l’âge de la première communion. Le milieu si calme, cette petite maison endormie à l’ombre de la cathédrale, embaumée d’encens, frissonnante de cantiques, favorisait l’amélioration lente de ce rejet sauvage, arraché on ne savait d’où, replanté dans le sol mystique de l’étroit jardin ; et il y avait aussi la vie régulière qu’on menait là, le travail quotidien, l’ignorance où l’on y était du monde, sans que même un écho du quartier somnolent y pénétrât. Mais surtout la douceur venait du grand amour des Hubert, qui semblait comme élargi par un incurable remords. Lui, passait les jours à tâcher d’effacer de sa mémoire, à elle, l’injure qu’il lui avait faite, en l’épousant malgré sa mère. Il avait bien senti, à la mort de leur enfant, qu’elle l’accusait de cette punition, et il s’efforçait d’être pardonné. Depuis longtemps, c’était fait, elle l’adorait. Il en doutait parfois, ce doute désolait sa vie. Pour être certain que la morte, la mère obstinée, s’était laissé fléchir sous la terre, il aurait voulu un enfant encore. Leur désir unique était cet enfant du pardon, il vivait aux pieds de sa femme, dans un culte, une de ces passions conjugales, ardentes et chastes comme de continuelles fiançailles. Si, devant l’apprentie, il ne la baisait pas même sur les cheveux, il n’entrait dans leur chambre, après vingt années de ménage, que troublé d’une émotion de jeune mari, au soir des noces. Elle était discrète, cette chambre, avec sa peinture blanche et grise, son papier à bouquets bleus, son meuble de noyer, recouvert de cretonne. Jamais il n’en sortait un bruit, mais elle sentait bon la tendresse, elle attiédissait la maison entière. Et c’était pour Angélique un bain d’affection, où elle grandissait très passionnée et très livre acheva l’œuvre. Comme elle furetait un matin, fouillant sur une planche de l’atelier, couverte de poussière, elle découvrit, parmi des outils de brodeur hors d’usage, un exemplaire très ancien de la Légende dorée, de Jacques de Voragine. Cette traduction française, datée de 1549, avait dû être achetée jadis par quelque maître chasublier, pour les images, pleines de renseignements utiles sur les saints. Longtemps elle-même ne s’intéressa guère qu’à ces images, ces vieux bois d’une foi naïve, qui la ravissaient. Dès qu’on lui permettait de jouer, elle prenait l’inquarto, relié en veau jaune, elle le feuilletait lentement d’abord, le faux titre, rouge et noir, avec l’adresse du libraire, à Paris, en la rue Neufve Nostre-Dame, à l’enseigne Saint Jehan Baptiste » ; puis, le titre, flanqué des médaillons des quatre évangélistes, encadré en bas par l’adoration des trois Mages, en haut par le triomphe de Jésus-Christ foulant des ossements. Et ensuite les images se succédaient, lettres ornées, grandes et moyennes gravures dans le texte, au courant des pages l’Annonciation, un Ange immense inondant de rayons une Marie toute frêle ; le Massacre des Innocents, le cruel Hérode au milieu d’un entassement de petits cadavres ; la Crèche, Jésus entre la Vierge et saint Joseph, qui tient un cierge ; saint Jean l’Aumônier donnant aux pauvres ; saint Mathias brisant une idole ; saint Nicolas, en évêque, ayant à sa droite des enfants dans un baquet ; et toutes les saintes, Agnès, le col troué d’un glaive, Christine, les mamelles arrachées avec des tenailles, Geneviève, suivie de ses agneaux, Julienne flagellée, Anastasie brûlée, Marie l’Égyptienne faisant pénitence au désert, Madeleine portant le vase de parfum. D’autres, d’autres encore défilaient, une terreur et une piété grandissaient à chacune d’elles, c’était comme une de ces histoires terribles et douces, qui serrent le cœur et mouillent les yeux de Angélique, peu à peu, fut curieuse de savoir au juste ce que représentaient les gravures. Les deux colonnes serrées du texte, dont l’impression était restée très noire sur le papier jauni, l’effrayaient, par l’aspect barbare des caractères gothiques. Pourtant, elle s’y accoutuma, déchiffra ces caractères, comprit les abréviations et les contractions, sut deviner les tournures et les mots vieillis ; et elle finit par lire couramment, enchantée comme si elle pénétrait un mystère, triomphante à chaque nouvelle difficulté vaincue. Sous ces laborieuses ténèbres, tout un monde rayonnant se révélait. Elle entrait dans une splendeur céleste. Ses quelques livres classiques, si secs et si froids, n’existaient plus. Seule, la Légende la passionnait, la tenait penchée, le front entre les mains, prise toute, au point de ne plus vivre de la vie quotidienne, sans conscience du temps, regardant monter, du fond de l’inconnu, le grand épanouissement du rêve.

la fortune des rougon résumé par chapitre